Sexisme dans le jazz : des avancées encore trop timides

Le jazz est-il un milieu sexiste ? C’est la question à laquelle tâche de répondre une étude, publiée la semaine dernière, menée notamment à l’initiative de l’Association Jazzé Croisé (AJC) et de Grands Formats, des organisations représentantes de jazz et de musique improvisée. Une étude à la fois statistique et qualitative, basée sur des entretiens. Conclusion : quand on fait du jazz, en 2024, mieux vaut – toujours – être un homme qu’une femme.

Des musiciennes qui tendent à être sexualisées, des hommes plus représentés dans toutes les catégories d’instruments, les cuivres, la guitare et la batterie en tête… « Pour l’instant, le jazz n’est pas devenu un univers plus mixte, plus paritaire, plus ouvert », pointe Marie Buscatto, professeure de sociologie à l’université Paris 1, qui a coordonné l’étude. Une constante que cette dernière observe depuis 25 ans et plus largement dans l’histoire du jazz, genre musical où les hommes ont tendance à se coopter : « Cette habitude de travailler entre hommes reste encore forte dans le jazz. Les musiciens ont été ‘copains’ dès leur plus jeune âge avec d’autres garçons, ils ont constitué des groupes, pris l’habitude de travailler avec eux. Ils connaissent peu de femmes musiciennes, sont peu habitués à les recruter et à travailler avec elles. Et finalement, cela se fait de manière très inconsciente, involontaire. »

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« Des réflexions hallucinantes »

Et les musiciennes souffrent de ces comportements. Cela va de la discrimination aux commentaires déplacés. Anne Paceo, batteuse, multi-récompensée aux Victoires du Jazz, raconte : « J’ai encore entendu des réflexions hallucinantes sur les Victoires du Jazz de cette année, ou de l’année d’avant, qu’une femme avait décroché le prix parce que c’était une femme. Il faut arrêter ces réflexions, parce que la femme ne mérite pas moins qu’un mec, en fait. » Pour la musicienne, il faudrait prendre le problème à la racine : « Dans les écoles, il faut faire en sorte que les jeunes femmes qui étudient la musique ne soient pas dégoûtées de faire ce métier. Quand j’étais au Conservatoire supérieur de Paris, j’ai subi beaucoup, beaucoup de sexisme. Et j’aurais eu moins de force de caractère, je pense que j’aurais tout envoyé valser, parce que c’était hyper dur ».

La pianiste, flûtiste et compositrice Eve Risser se souvient elle aussi d’une période compliquée. C’était dans les années 2010, elle était alors la seule femme à jouer dans l’Orchestre National de Jazz : « À aucun moment je n’arrivais vraiment à être moi-même. Soit je me transformais un peu en ‘meuf sexy’ pour avoir l’admiration de mes copains, soit j’essayais de me transformer en ‘petit gars’, pour avoir leur sympathie. »

Une lente évolution

Eve Risser note tout de même un changement, dans le sillage du mouvement MeToo, même si des blocages demeurent, notamment chez les programmateurs : « Il peut arriver que des programmateurs hommes continuent de se projeter sur des groupes d’hommes, puisqu’ils ont toujours vu des groupes d’hommes aux instruments, et des femmes au chant. La deuxième question qu’ils posent, c’est ‘oui, mais il n’y en a pas beaucoup, donc comment je fais ?’ Il faut donc leur expliquer qu’il faut chercher longtemps, prendre le temps. Et je rencontre des programmateurs très féministes, qui eux font la démarche, et qui hallucinent que d’autres ne la fassent pas. »

Quelques tendances encourageantes : il y a plus en plus de femmes directrices de structures. Plus de musiciennes de jazz, aussi : sur l’échantillon étudié, 20% en 2018, presque 30% en 2022. « On sent qu’il y a quelque chose qui évolue. Des politiques publiques conditionnent les financements à la parité, à la mixité. L’esprit évolue, lui aussi : les hommes et les femmes du jazz voudraient que le milieu se féminise et que les pratiques sexistes soient moins nombreuses, voire cessent », souligne Marie Buscatto. Pour la sociologue, ce n’est que par le nombre et l’habitude que le monde du jazz apprendra à voir les femmes non comme des femmes, mais comme des musiciennes à part entière.

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